26 Juillet 2021
FRANCE •
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(relâche lundi 26)
Tout en nuances de gris et de noirs, une pointe de rouge représentative du sang versé, synonyme de la noirceur des âmes et de la violence des hommes, le décor est réduit à une chaise pour lui. Laurent Mascles , tour à tour rapporteur, colonel, terroriste, homme d'état, est impressionnant de force et de convictions dictées par des Pouvoirs extrêmes, dans un jeu parfaitement étudié et maîtrisé ... Marie de Oliveira , interprète de la journaliste Anna Politkovskaïa, est debout à côté de lui.
Un écran de fumée est diffusé plus ou moins en continu sur un fond ténébreux, dans une pénombre transpercée parfois par un éclairage soudain des acteurs, comme un accusé soumis à un interrogatoire. Parfois, une lumière voilée tente de les unir sur un point de vue, un doute, un questionnement, un compromis, bien évidemment impossibles. La musique de Gilles Monfort a été composée spécialement ; elle est prenante, indissociable des dialogues, un rien psychédélique. Enfin le jeu, surtout le jeu de ces 2 excellents comédiens! Un rien de gestes, tout dans la diction, le Verbe, le ton... et les regards! Oh! l'intensité des regards! ... dirigés vers les profondeurs noires de la salle, au-dessus de nos têtes, rivés sur une menace invisible, quelque chose d'ancré en eux qui nous échappe.
"Ni avis, ni commentaires, ni opinions, ni jugements."
Anna ne condamne pas, elle témoigne : contre le saccage, l'assassinat, la violence, la torture et le viol. On l'accuse de diffamation, d'être folle, schizophrène, paranoïaque. Elle est incriminée, considérée comme une ennemie, menacée de tous bords.
"De quel côté est-elle ?" "Prendre position, est-ce faire preuve d'intelligence ? "
S'enchaînent des récits, des témoignages, des interviews relatant des faits de guerre évidemment violents, sanguinaires : exterminations, attaques, attentats,... qui se rapportent à la période allant du début de la 1ère guerre en décembre 1994 (elle s'achèvera avec la victoire des Tchétchènes en décembre 1996 ) à l'assassinat d'Anna le 7 octobre 2006 à Moscou (elle avait 48 ans).
"Pour les Russes, la guerre en Tchétchénie était une guerre de rebelles à dompter. Pour les Tchétchènes, la Russie est une terre de chefs à chasser, dans le sang! (...) Il en est ainsi depuis le XVIIIè siècle. (...) Dans les deux camps, la guerre est devenue pratiquement un mode de vie. (...) Les mercenaires russes, hommes jeunes, souvent orphelins, vont même jusqu'à souhaiter qu'elle ne finisse jamais."
L'ouvrage de Stefano Massini traduit par Pietro Pizzuti est parfaitement respecté et restitué. Il rend les lettres et articles écrits par la journaliste terribles et beaux à la fois. Ce sont des textes forts qui nous amènent à réfléchir sur nos propres engagements.
notre correspondante Avignonnaise
Rédaction : Catherine Giraud
DIFFUSION 26/07/2021