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ROUGE ○ Vermeilles

  FRANCE •

ROUGE ○ Vermeilles

Si l’on devait se risquer à esquisser une petite typologie des trios piano/contrebasse/batterie apparus ces derniers temps dans le très composite paysage jazzistique contemporain, on se retrouverait rapidement en présence de deux grandes familles fondant essentiellement leurs différences sur un rapport plus ou moins direct, érudit et concerné à la tradition et à l’histoire particulière de cette formule orchestrale devenue depuis le tournant des années 70 l’une des plus archétypales du jazz (post-)moderne.

En effet, si d’aucuns continuent d’inscrire leur discours dans la perspective et la continuité des grands pianistes de jazz ayant marqué l’histoire du trio de leur génie (poursuivant selon les cas les riches héritages de Thelonious Monk, Ahmad Jamal, Bill Evans, Paul Bley, Keith Jarrett, Chick Corea ou encore Brad Mehldau), un certain nombre de musiciens de la jeune génération assument en conscience de s’émanciper de ce réseau de filiations potentiellement pesant et inhibant — cherchant (et trouvant !) leur liberté de geste et de ton dans une relation beaucoup plus intuitive et sensitive au vaste répertoire des musiques mondiales. 

Puisant leurs références et influences, sans souci d’ordre ni de hiérarchie, aussi bien dans l’univers du classique que dans le champ des musiques nouvelles, empruntant leurs grooves autant à l’électro-pop contemporaine qu’aux diverses traditions extra-européennes qu’elles soient savantes ou populaires, ces “nouveaux trios”, avec une forme d’ingénuité et d’audace toute juvénile, n’entendent certes rien révolutionner — mais ouvrent incontestablement  au “jazz”  (dont ils continuent pour la plupart de se réclamer) d’inédites perspectives, multipliant à ses frontières les zones d’échanges et de dialogues en hybridations toujours plus personnelles.

C’est, sans l’ombre d’un doute, à cette seconde catégorie (tout sauf homogène d’un strict point de vue stylistique) qu’appartient le jeune trio français Rouge qui aujourd’hui fait paraître sur Label Bleu avec “Vermeilles” un second disque à la fois profondément cohérent et maîtrisé dans son projet et délicieusement insituable dès qu’il s’agit de définir son pédigrée et rendre compte dans le détail de l’étendue des territoires esthétiques qu’il arpente.

Fondé à la fin de l’année 2018 par la pianiste Madeleine Cazenave en compagnie du contrebassiste Sylvain Didou et du batteur Boris Louvet, Rouge n’aura guère mis de temps à se faire une place de choix dans le paysage aussi riche que diversifié du nouveau jazz hexagonal. Repéré et sélectionné par le dispositif Jazz Migration qui lui offre dès 2020 l’opportunité de tester in situ l’impact de ses compositions sur le public au fil d’une longue série de concerts, le jeune trio signe dans la foulée avec “Derrière les paupières” un premier disque aux allures de manifeste, qui aussitôt marque les esprits en déclinant les séductions  toutes en nuances et variations d’une musique atmosphérique et ultra-sensitive cherchant à articuler une vraie quête de simplicité expressive tant sur le plan individuel que collectif avec une ambition formelle constante, empruntée autant à la tradition classique qu’au pop-folk contemporain.

Si ce choix de mettre à distance toute forme d’épanchement égotique en travaillant à élaborer patiemment un son de groupe organique et immédiatement identifiable apparaît dès cet instant comme la signature principale de Rouge, la personnalité complexe et atypique de la pianiste, “leadeuse” de la formation et principale contributrice de son répertoire, interpelle. On s’avise de son parcours marqué par une solide formation classique ; de son tropisme pour la musique française du 20e siècle (de Ravel à Satie) qui souvent surgit sous ses doigts au hasard d’une phrase ou, de façon plus concertée, dans le moiré harmonique d’un arrangement — mais aussi de son travail de compositrice pour le spectacle vivant (“Variations pour piano et polystyrène”, “Projet fantôme” et “Le bruit des loups” en collaboration avec le magicien Étienne Saglio) ainsi que de ses premières incursions du côté de l’improvisation au tournant des années 10, l’espace de deux disques solo, “Octobre” et “Matines”, posant les bases d’un univers lyrique à la beauté fragile, orienté vers une forme de dépouillement harmonique dans la lignée de certaines pièces du recueil “Children’s Songs ”de Chick Corea

Indéniablement, à la fois farouche et introvertie, tendre et violente dans la même inflexion, Madeleine Cazenave marque de sa sensibilité néoromantique aux accents hyper-contemporains les orientations esthétiques du trio.

En rejoignant aujourd’hui Label Bleu pour publier avec “Vermeilles” un second album aussi ambitieux que séduisant,Rouge franchit un nouveau cap. Si l’on retrouve pour l’essentiel les mêmes ingrédients que dans “Derrière les paupières” le trio a incontestablement gagné en maturité et en maîtrise collective. Agrémentant son discours résolument acoustique d’un recours subtil à l’électronique au gré d’arrangements collégiaux d’un grand raffinement où la moindre variation de couleurs, de textures ou de dynamiques participe d’un vrai travail de scénographie orchestrale redistribuant la place et le rôle de chaque instrument à l’intérieur d’une dramaturgie compositionnelle toujours différente, le trio développe en une série de compostions atmosphériques et ultra-mélodiques des sortes de tableaux-paysages aux formes évolutives saisissant à l’intérieur de cadres très précisément dessinés et définis les plus infimes variations d’humeurs de la formation.

Passant de morceaux pulsés de grooves cotonneux minimalistes empreints d’une sorte de mélancolie pop (Feu,Louves,Move in) à des compositions hybrides aux mouvements contrastés laissant sourdre des références plus ou moins subliminales à la musique classique (Granit, Tempête) voire à la chanson (le très beau Strawberries in the Dark, interprété par la chanteuse folk britannique Kate Stables) — Rouge réaffirme ici avec force et talent la singularité de son univers en travaillant vers toujours plus d’épure lesfondamentaux de sa musique à la fois contemplative et sensorielle, donnant constamment à entendre plus que ce qui est joué par une précision et une élégance d’écriture de tous les instants.

ROUGE Vermeilles

Sortie le 📌 2 février 2024

Label Bleu

Madeleine Cazenave : piano

Sylvain Didou : contrebasse ○ Boris Louvet : batterie

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En tournée en 2024 :

- 2 février : Tour des arts -  Les Herbiers

- 3 mars : La Sirène - La Rochelle

- 22 mai : Maison de la culture - Amiens

- Date parisienne en cours

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Le trio Rouge, mené par la pianiste Madeleine Cazenave sort "Vermeilles", album mêlant leurs diverses influences (classique, electro pop, chanson, jazz)

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DIFFUSION 15 DECEMBRE 2023  


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